Emery Jacquillat
Nous l’avons vu, le courage implique l’action malgré les risques. Il implique de s’exposer, de défendre ses idées en mots et en actes, parfois à contre-courant, au risque de se mettre en porte à faux personnellement.
“Le courage, c’est la capacité à se mettre dans l’inconfort et à s’exposer aux risques au nom d’une cause commune.” – Titouan Rio, président de l’association Jeunes ambassadeurs pour le climat qui a pour ambition de faire entendre les voix de jeunes citoyens jusque dans les négociations internationales sur le climat.
Mais si le premier pas est aussi vertigineux et angoissant que libérateur, les enjambées qui suivent requièrent une autre qualité : l’abnégation.
“Le courage, ce n’est pas juste un “one shot”, c’est de la persévérance aussi.” – Emery Jacquillat, président Camif et Communauté des Entreprises à Mission.
“C’est un travail de fond, de convaincre les parties prenantes. Ce n’est pas seule la décision d’un dirigeant qui fait bouger les lignes, mais aussi la capacité à embarquer les collaborateurs de l’entreprise comme ses parties prenantes.” – Carine Kraus
“S’il y a des obstacles, soit il faut les passer, soit il faut les contourner. Le chemin vers la durabilité n’est pas une ligne droite. Mais dans le courage, il n’y a pas de place pour le renoncement. Il y a la place pour l’échec mais pas pour le renoncement.” – Nicolas Hieronimus, PDG du Groupe L’Oréal qui a initié en 2020 le plan L’Oréal for the future pour inscrire l’activité du groupe dans les limites planétaires.
Et c’est là que l’impératif de vérité en amont prend tout sens : on est prêt à affronter les difficultés justement parce qu’on se lance dans l’aventure en toute lucidité. C’est ce travail amont sur soi qui permet de ne pas tomber des nues, d’anticiper l’effort à fournir et les déconvenues. Pour ne pas lâcher l’affaire aux moments charnières.
“Il faut surmonter les obstacles en ayant connaissance des difficultés, ne pas baisser les bras face à l’ampleur de la tâche : on sait que ça va être difficile mais on est prêt à y aller.” – Baptiste Eisele, membre du collectif Pour un réveil écologique
Nicolas Hieronimus
Car le plus gros facteur de démotivation, c’est certainement cette période qui se trouve après l’ivresse du saut dans le vide, après le premier pas : celle où tout est à mettre en place et où rien ne porte encore ses fruits. C’est le moment où se désengagent les parties prenantes, où fleurissent les détracteurs. Et c’est à cet instant le plus difficile que le dirigeant est spécifiquement le moins bien entouré.
“Pendant un moment tu es en chute et tu te dis ‘wouah, où est-ce que je suis en train d’emmener la boîte ?’ Et dans ces moments de difficultés, le dirigeant est seul.” – Emery Jacquillat
→ Un premier conseil pour traverser la tempête : savoir s’entourer pour sortir de la solitude.
“Aller chercher dans l’entreprise les personnes qui ont vraiment envie de s’engager”, comme le préconise Philippe Blondiaux, ou, selon Brune Poirson, Chief Sustainability Officer chez Accor, “s’entourer de pairs que les dirigeants admirent et respectent”, avec lesquels ils peuvent faire tomber le masque et se confier sur leurs difficultés.
→ Un deuxième conseil : ne pas s’éparpiller et rester bien ancré sur ses fondamentaux.
“Vous ne pouvez pas tout faire, mais choisissez les domaines qui vous tiennent à cœur et allez-y.” – Barry Parkin, Chief Procurement & Sustainability Officer de Mars. Et cela implique d’avoir une boussole personnelle solide, des convictions bien ancrées pour ne pas dévier le cap. C’est tout l’intérêt de l’exercice préalable de vision. “Le courage, c’est la capacité à rester aligné avec ses convictions en dépit de l’opinion commune, même si cela peut sembler contre intuitif car, au final, c’est l’alignement qui permet de concilier engagement et performance.” – Pascal Demurger, directeur général de la MAIF.
Philippe Zaouati
Jusqu’à ce que les premières réussites pointent le bout du nez, entraînant avec elles les fiertés collectives et l’engagement reboosté des parties prenantes.
“L’alchimie se met en place progressivement. Ça finit par te dépasser et c’est là que c’est bon.” – Emery Jacquillat
“La question du collectif est essentielle : un leader doit s’appuyer sur les énergies autour de soi.” – Philippe Zaouati, directeur général de Mirova
Les éclaircies pointent à l’horizon quand le projet n’est plus celui des dirigeants : il leur est dépossédé pour être celui du collectif tout entier.
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